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LE PRINTEMPS DES
JEUNES REPORTERS
UN PROJET GÉNÉR ATION ÉCRITURE


Derrière chaque livre se cache
un véritable sorcier. Une personne
qui manie les mots certainement
aussi bien que la magie des histoires.
Qui a le pouvoir d’inventer, de
transporter, de faire rire et pleurer.
Ils insufflent même la vie à quelques
personnages que l’on pourrait croire
réels, si leurs destinées ne couraient
pas sur des lignes d’encre. Des
enchanteurs que l’on pourrait croire
inaccessibles, intouchables, dont le
savoir dépasserait nos douces rêveries
de lecteur candide.


Mais il n’en est rien. Et c’est
pour cette raison que Génération
Écriture a proposé aux jeunes auteurs
de découvrir les créateurs derrière les
pages de ces romans qu’ils ont dénichés
et appréciés. Pour que ces derniers
partagent les secrets de leurs recettes,
le chemin qu’ils ont parcouru depuis
leurs premiers pas en tant qu’apprentis,
leurs motivations et les sources de leurs
inspirations débordantes.

Ce projet, c’est donner une
responsabilité, sous les aspects d’une
quête, aux auteurs amateurs, de percer le
voile qui sépare l’auteur de ses lecteurs,
d’ouvrir un terrain de discussions,
d’échanges, autour de ces processus
infinis de création.

• SOMMAIRE •
p.4
4
5
p.8
8
10
p.13
13
14
p.17
17
18
p.22
22
23

La Voie de la Colère, Antoine Rouaud - par Matt
• Chronique du roman
• Interview de l’auteur
Gagner la guerre, Jean-Philippe Jaworski - par Lorelei
• Chronique du roman
• Interview de l’auteur
Les Fiancés de l’Hiver, Christelle Dabos - par Laure
• Chronique du roman
• Interview de l’auteur
Lune Mauve, Marilou Aznar - par Lizzie K.
• Chronique du roman
• Interview de l’auteur
Les Outrepasseurs, Cindy Wilder - par Toshiro
• Chronique du roman
• Interview de l’auteur


Au-delà
d’une
simple
invitation à la lecture comme
pourraient vous le proposer de
nombreux supports, ce webzine horssérie vous fera découvrir les mystères
qui entourent ces grimoires, qui
ont su combler ou plaire à d’autres
auteurs en herbe. Et qui sait. Peutêtre que vous de même deviendrezvous intrigué et désireux de savoir qui
se cache derrière ce roman, là, celui
que vous tenez en ce moment-même
entre vos mains.

Peut-être deviendrez-vous à
votre tour un jeune reporter ?
Ielenna

À PROPOS DE
GÉNÉRATION ÉCRITURE
Créée en 2010, l’association
œuvre pour les jeunes auteurs,
dont le travail mérite d’être encouragé et reconnu. Au travers
de projets communs variés,
son but est de rassembler les
auteurs, de les motiver et de
leur faire prendre confiance en
eux, pour les pousser toujours
plus loin, le tout dans une politique d’entraide et de partage
constants.
Pour en savoir plus :
generation-ecriture.com
Page Facebook

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L’appropriation, l’emprunt, le plagiat de nos articles et photos est une violation du code de la propriété intellectuelle des auteurs.
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Ce webzine n’est pas destiné à la commercialisation.

L E

P R I N T E M P S

D E S

J E U N E S

C H R O N I Q U E

R E P O R T E R S

L I T T É R A I R E

— LA VOIE DE LA COLÈRE —
par Matt


Cette lecture date d’il y a un
petit moment déjà, et j’avoue que je
n’ai pas pensé à noter mes idées, cependant je vais essayer d’être la plus
claire possible.


Ce roman, qui m’a été prêté
par ma chère amie Dy (mais oui mais
oui) me faisait de l’œil depuis un moment, tant par sa couverture que par le
résumé plutôt alléchant qui promettait
un bon roman de fantasy, chose que je
n’avais pas lue depuis un certain temps.
Qui plus est, il s’agit du premier roman
d’un auteur de trente ans et je ne sais
pas, j’avais envie de le découvrir (ouais
je sais j’ai des lubies étranges). Et en
plus de tout ça, Dy possédait donc le
livre dédicacé par l’auteur, en grand

format Bragelonne. Et c’est pour ça
que c’est aussi agréable de se prêter des
livres. Bref, commençons.

La Voie de la colère, c’est l’histoire de Dun-Cadal Daermon, général
d’une armée au service d’un empire
(que je vous cite les noms ne vous indiquerait pas grand chose de plus). On le
retrouve au début du roman, dans une
taverne, en train de comater (oui ce
mot n’est pas vraiment français mais ça
résume bien l’état du type) sur sa bière
et de se lamenter sur son sort, parce
que la vie c’était mieux avant, ceci, cela
(puis de toute façon maintenant que
je suis vieux je peux plus rien faire de
bien, tout est fini, alors je me bourre la
gueule continuellement). Bon, c’était
un grossier aperçu du personnage. Et
là, une certaine Viola, une jeune historienne, vient le trouver, le temps de
le secouer un bon coup, et puis c’est
parti ! En fait, le livre fonctionne ainsi :
une scène de flash-back, si je puis appeler ça comme ça, dans le passé de DunCadal, quand il était un jeune général
vigoureux et surtout, sobre. Et une
scène dans le présent en compagnie de
Viola où le vieil homme est confronté
à de nouveaux problèmes.

Autant vous le dire tout de
suite, les flash-backs peuvent être déconcertants et je comprends que ça
soit frustrant, parce qu’à chaque fois
évidemment, on laisse le Dun-Cadal
du passé ou celui du présent dans une
4

situation où rahh, on aimerait lire la
suite sur le champ et on n’a pas envie
de faire autant de sauts dans le temps
et de rester sur notre faim. Alors certes, au début, c’est frustrant (comme
je le disais juste au-dessus) et il faut s’y
habituer. Et puis après, quand on commence à saisir où l’auteur veut en venir
(et où il veut nous mener), tout s’éclaire. Donc ce n’est pas quelque chose qui
m’a dérangée personnellement dans
ma lecture, en tout cas. C’est même un
processus que je trouve très intéressant
et que l’auteur exploite bien.

Bon, et à part ça  ? Je vous le
dis tout de suite : j’ai beaucoup aimé !
C’est ce genre de roman qui met la
barre très haut dès le début et qui ne
déçoit pas les attentes. Il réunit tous
les bons ingrédients pour en faire un
excellent roman fantasy. D’abord, j’ai
été subjuguée par le style : vocabulaire
précis, belles descriptions, excellente
narration et dialogues plutôt réussis.
C’est fourni tout en restant très fluide
et ça contribue à l’ambiance fantasy
du roman. C’est frais, ça foisonne d’un
peu partout, bref, ça se lit vraiment tout
seul tout en régalant de scènes d’action
mémorables et de paysages tous plus
beaux les uns que les autres.

Au niveau de l’intrigue, je
vous le dis tout de suite  : je me suis
complètement fait avoir par l’auteur,
mais alors, du début à la fin. Enfin disons que je me disais « oui, bon, c’est

G É N É R A T I O N

bien mais c’est un peu prévisible, tout
ça...  » Oh là, mais quel jugement hâtif  ! Pour le coup, j’ai pensé trop vite
– et heureusement, hein, parce que ça
n’aurait pas été drôle autrement. Bref,
ne refermez pas le livre avant de l’avoir
terminé, parce que je peux vous assurer
que niveau suspense/surprises, vous le
regretteriez tant il y a de quoi faire. De
nombreux personnages sont également
sur ce même principe, c’est-à-dire que
vous avez l’impression de bien cerner
le type et puis en fait, l’auteur réduit
vos jugements à néant en quelques lignes. Même si, au final, ça reste de la
fantasy plutôt classique (et ce n’est certainement pas un point négatif de mon
point de vue), eh bien sachez que le
roman saura vous étonner !

Quant aux personnages, comme je le disais juste au-dessus, ils sauront vous étonner aussi. En tout cas, j’ai
beaucoup apprécié la plupart d’entre
eux (et détesté ceux qui devaient l’être),
j’ai été surprise par le revirement de
certains, même si au fond, j’aurais bien

É C R I T U R E

-

H O R S

dû m’en douter, et j’ai été bluffée par le
réalisme et la beauté de tout ce monde.
Bref, comme tout le reste, les personnages, que l’on suit dans différentes parties de leur vie, sont très bien fournis et
leur évolution est vraiment intéressante.

Je dirais donc que La Voie de la
colère est un très bon roman de fantasy,
qui reprend les classiques du genre
tout en se creusant sa propre route. La
plume est de qualité, et les personnages, de même que l’intrigue, sont bien
pensés et le tout offre une lecture intense. Le seul reproche que j’aurais à
faire à l’auteur serait peut-être cette fin
un poil prévisible mais, comme tout le
reste m’a agréablement surprise, ça ne
m’a pas vraiment dérangée. C’est donc
un roman que je conseille à tous les
fans de fantasy, mais aussi à ceux qui
sont moins fans car par l’humanité de
ses personnages, l’histoire saura vous
chambouler. Je n’ai plus qu’une chose
à ajouter  : j’attends d’ores et déjà le
tome deux avec impatience !

I N T E R V I E W

D E

S É R I E

# 3

FICHE AUTEUR :
ANTOINE ROUAUD
Antoine Rouaud est né en
1979. Il a passé son enfance à
écrire des histoires, imaginer
des scénarios et composer des
chansons, avant de rejoindre
le monde de la radio. Il est
aujourd’hui concepteur-rédacteur chez NRJ et travaille sur
plusieurs séries de feuilletons
audio, pour lesquels il a déjà
remporté deux prix. Sa première œuvre éditée, Le Livre et
l’Épée, est une trilogie publiée
aux éditions Bragelonne.
Le Livre et l’Épée est une œuvre qui réunit bien des prouesses. L’une d’entre elles est d’être
le premier roman de Fantasy
français à connaître une sortie
mondiale.
Source :
antoinerouaud.com

L ’A U T E U R

— ANTOINE ROUAUD —

Tout d’abord, quand avezvous commencé à écrire et pourquoi ?

J’ai toujours écrit. Je ne saurais
dire pourquoi. Il doit y avoir un lien
avec le jeu, créer des histoires avec des
petits bonhommes, écrire des histoires
avec d’autres petits bonhommes. Dès
que j’ai été en âge d’écrire, je l’ai fait. Il
y avait cette envie de « vivre » quelque
chose de différent.

papier. En parallèle, je me gavais de
romans, Jules Verne quand j’étais
petit, Tolkien, Stephen King, Barjavel,

Très tôt, le cinéma. D’abord adolescent. Des histoires comme La
E.T., Les Aventuriers de l’arche perdue, Nuit des Temps de Barjavel ou Shining
Les Goonies… tout ce qui a été produit de King m’ont marqué. Je crois que
dans les années 1980 et qui tournait c’est à partir de ce genre d’œuvres que
autour de Lucas et Spielberg. J’ai mon envie de raconter des histoires
d’abord écrit en pensant au cinéma. s’est accrue au point d’en devenir un
Je n’avais pas de caméra pour filmer véritable besoin.
mes histoires. Je les couchais sur

Quelles sont les œuvres qui
vous ont influencé, au départ ?

5

L E

P R I N T E M P S


Comment avez-vous eu l’idée
de commencer La Voie de la colère et
combien de temps la rédaction du premier jet vous a-t-elle pris ?

Ça ne s’est pas fait en un instant T, en vérité. J’avais proposé un
roman à Bragelonne, mais avec une
toute autre histoire, plus axée jeunesse,
à l’époque où ils n’en publiaient pas.
Le roman a été refusé, cependant,
ils m’ont demandé de leur présenter
un autre travail. J’ai eu l’idée tout de
suite, Dun-Cadal en tête et le garçon
qui le sauve, d’un monde se remettant
peu à peu d’une violente révolution…
Seulement, avec le recul, je m’aperçois qu’il y a des échos d’œuvres précédentes que j’avais mises de côté, des
situations, des envies. Il y a eu donc
deux étapes, celle d’une maturation
de l’histoire, et celle où tout s’est mis
en place d’un coup.

Quelles sont les étapes les plus
difficiles dans la création d’un roman ?

On écrit seul. On se retrouve face à nos choix, nos doutes, nos
questionnements. Il y a un fort désir,
enfin je le crois, chez l’auteur. Ce désir
d’embarquer un lecteur dans son univers, qu’il vive quelque chose, qu’il
ressente… Il y a tellement d’efforts,
de remises en questions, de travail sur
un livre qu’il est compliqué de recevoir les corrections éditoriales. C’est,
selon moi, l’étape la plus compliquée
émotionnellement, car ce qu’on a mis
dans notre histoire est discuté, comme
si, finalement, ce qu’on a proposé à
un éditeur ne valait rien et qu’il fallait
écrire autre chose. Et puis, on réfléchit, on retravaille, on affine le texte
en acceptant cette blessure d’égo. Le
résultat est assez surprenant. Il n’y a
pas grande différence finalement avec
le premier jet, sur le fond comme sur la
forme. Je crois qu’en définitive, ce qui
est fondamentalement difficile dans la

D E S

J E U N E S

R E P O R T E R S

création d’un roman, c’est de supporter ce lien affectif que nous avons avec
notre texte, nos personnages, nos mots
utilisés. Ils sont soumis aux critiques,
constructives ou gratuites, mais ça ne
les touche pas eux. C’est l’auteur qui
supporte.

coup avant même d’avoir lieu, on apprend à se connaître. Les doutes, les
angoisses… je les ai surmontés pour le
premier tome.


Quel est le personnage dans
lequel vous vous reconnaissez le plus
dans La Voie de la colère ? Celui que

Avez-vous reçu de l’aide du- vous préférez ?
rant la rédaction de votre roman ? Par
quels biais ?

Sans conteste Grenouille  ! Il
veut prouver au monde de quoi il est

Durant les corrections sur- capable. J’étais dans le même état en
tout, lorsqu’il y a eu ce travail de écrivant le livre, avec beaucoup de
coupe, de taillage, pour que l’his- moins de prétentions que lui. Ses sentoire soit encore mieux qu’un simple timents le portent plus que sa raison,
premier jet. C’est surtout Quentin pour le moment. C’est ce qui fait qu’il
Daniel, un ancien libraire et l’un des ne lâche rien de bout en bout. Et puis, il
premiers lecteurs de mon roman, qui y a Dun-Cadal… le genre de personnaa mis le doigt sur certains passages ge qu’on aime détester, qu’on apprend à
méritant d’être retravaillés. Stéphane aimer. Il est pour moi l’exemple même
Marsan et Claire Deslandes de Bra- du conflit de générations, de cette relagelonne ont aussi eu leur mot à dire, tion qui s’instaure entre quelqu’un qui
leurs suggestions, et Tom Clegg, le a vécu une autre époque et quelqu’un
traducteur pour la version anglaise, qui va vivre la sienne. Les idées s’affronqui m’a donné deux-trois conseils tent, amenant parfois à la détestation.
utiles. Je les prenais en compte, je Mais ce qui importe, en vérité, c’est
proposais des nouvelles moutures et, l’humanité qui se cache derrière ces
peu à peu, nous sommes arrivés au divergences. J’ai voulu lui donner cette
texte définitif.
image pourrie, ce côté dégueulasse du
vieux type raciste qui grommelle dans
sa barbe. Et qu’on apprenne à connaître et à comprendre qui il était et pour«
J’avais envie de prouver
quoi. Il est simplement le résultat d’un
que j’étais capable de devenir
système politique et culturel différent
»
et apprend, sur le tard, à se défaire de
un auteur.
ses œillères.

Comment s’est déroulé le pro
Que vous a apporté l’écriture
cessus
éditorial ?
de ce roman ?

Comme ça, à brûle-pourpoint,
du bonheur. J’avais envie de prouver
que j’étais capable de réaliser un rêve
d’enfant, d’écrire une belle histoire, de
devenir un auteur. Du moins, d’essayer.
Et puis, dans ces moments-là, où on est
près de toucher du bout des doigts son
rêve, craignant que cela ne cesse d’un
6


Par des échanges réguliers
entre l’éditeur et moi. Soit après une
réunion, soit par mail, j’avais le roman
annoté, avec des suggestions à tel ou tel
moment, des critiques sur telle phrase,
des conseils. Je retravaillais, leur envoyais et peu à peu, nous sommes arrivés à la version finale.

G É N É R A T I O N


Y a-t-il des choses que vous regrettez, autour de ce roman ? Si c’était
à refaire, referiez-vous la même chose ?

Oh, il y en a plein. Difficile de
revenir dessus. J’ai encore du mal à relire le livre de peur de me dire : … non,
t’aurais dû le dire comme ça. Pourtant,
si j’avais cette possibilité de le refaire, je
crois que je ferais pareil. Et puis, je suis
encore lié à cette histoire finalement,
puisqu’il reste deux tomes. Je n’ai pas
abandonné mes personnages, il y a encore des surprises…

Quel a été le moment le plus
émouvant/drôle/triste lors de la rédaction de votre roman ou autour de votre
œuvre ? (durant les salons, par exemple)

É C R I T U R E

-

H O R S

seul devant mon ordi à pester, à douter. Leur retour a été la conclusion
d’un long travail.

S É R I E

# 3

de croire en eux, de continuer à écrire,
d’accepter les critiques, les refus et de ne
jamais baisser les bras. Et aussi de savoir
pourquoi ils écrivent, dans quel but.


Quels sont vos prochains projets (j’ai vu que vous aviez commencé la
Pensez-vous qu’internet puisse
rédaction du tome 2 mais que ce n’était être un moyen pour eux de progresser
pas aussi aisé que vous l’auriez pensé) ? dans leur passion  ? Pourquoi, dans
quelle mesure ?

Le tome 2, d’abord. Le deuxième livre d’un auteur est le plus compli-
Oui mais c’est à double-tranqué, dit-on. Cela se confirme. D’autant chant. Via le net, on peut proposer
plus que ma vie a changé avec la sortie ses écrits, avoir des retours. Mais s’ils
du premier tome. Je dois composer avec flinguent (et internet favorise aussi
tout cela, réussir à travailler comme il pas mal cela), ça n’aide pas à progresfaut en omettant cette peur de ne pas ser, au contraire… Il y a des forums de
être à la hauteur. On se pose des tas de discussion, on peut également ouvrir
questions : et si je n’y arrivais pas ? Si je son blog facilement et montrer notre
ne pouvais pas faire mieux  ? Si c’était prose. Il faut juste se blinder. Personun simple coup de chance  ? Du coup, nellement, je ne sais pas si je l’aurais
l’écriture s’en ressent, elle n’est plus aus- fait si internet avait été aussi développé
si naturelle et plaisante… Il faut réussir quand j’avais treize-quatorze ans…
à passer ce cap. J’y arrive peu à peu. En Sûrement. Mais je me serais fait défontout cas, je l’espère. D’autant plus que cer, pour sûr. Il faut toujours se laisser
le tome 2 est vraiment un axe primor- le temps pour progresser. Et accepter
dial dans une trilogie. Ce qui fait que je qu’on n’a jamais fini de le faire…
suis également à préparer le tome 3. Ça
complique toujours la chose.

Je remercie Antoine Rouaud
de m’avoir donné un peu de son temps

Quels conseils donneriez-vous pour répondre à mes questions ! •
aux jeunes auteurs ?


Il y a eu la soirée de lancement
du livre avec mon nom marqué en gros
sur une pancarte… et puis Brighton,
la World Fantasy Convention en octobre 2013, où je me suis retrouvé au
milieu de nombreux auteurs du monde
entier… Moi, le petit gars de Nantes,
avec mon premier livre, je croise Joe
Hill, discute avec Scott Lynch… et
signe mon premier exemplaire pour
Trudi Canavan qui venait de lire le
livre et l’avait adoré. Ensuite, ça n’a
été que de belles rencontres dans les
salons, des échanges avec des lecteurs
C’est un peu présomptueux
qui me restent parce qu’ils me ramè- de ma part de vouloir donner des
nent aux longs moments d’écritures, conseils… peut-être simplement celui

Où suivre Antoine Rouaud ?
Sur son blog : www.antoinerouaud.com
Sur Facebook : antoinerouaud.auteur
Sur Twitter : Antoine_Rouaud
Se procurer le roman : Bragelonne.fr (ou chez tout bon libraire)

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L E

P R I N T E M P S

D E S

J E U N E S

C H R O N I Q U E

R E P O R T E R S

L I T T É R A I R E

— GAGNER LA GUERRE —
par Lorelei


Je me souviens particulièrement bien du moment où l’on m’a parlé de Jean-Philippe Jaworski, que mon
interlocuteur me désignait comme un
maître de la fantasy. Ayant toujours été
friande des genres de l’imaginaire et
de l’écriture ornementée, je me suis intéressée à sa bibliographie. J’ai lu tout
d’abord son recueil de nouvelles, Janua
Vera, que j’ai beaucoup apprécié. Un
ami m’a ensuite prêté Gagner la guerre,
qui, semblait-il, était dans la même veine
que la première œuvre de l’auteur. J’ai
commencé à le lire, puis me suis empressée de me procurer mon propre
exemplaire que j’ai dévoré en quelques
jours. C’est comme cela que j’ai achevé
la première lecture de ce roman dont je
vous propose une chronique.

lecteurs avaient déjà découvert dans
«  Mauvaise donne  », une nouvelle
appartenant au premier recueil de
l’auteur, Janua Vera. Maître assassin, il
devra faire appel à toutes ses facultés
de réflexion et à son agilité pour tirer
son épingle du jeu et réaliser la mission
qui lui est confiée par le podestat Leonide Ducatore, dirigeant de la république de Ciudalia.

Les premières impressions
que nous donne la lecture :


La première fois que j’ai lu le
roman, j’étais partagée entre la surprise
et l’amusement. L’auteur sait nous
plonger dans cette histoire, brillamment narrée par Benvenuto Gesualdo,
qui nous présente le travail dont l’a
chargé le podestat. Bien qu’un peu

De quoi parle ce roman ?
étonnée par l’emploi de la première

Gagner la guerre se déroule personne, j’ai pu par la suite remarquer
dans un univers inspiré de la renais- que ce choix donnait une véritable
sance Italienne. Nous y suivons les pé- dimension cynique au récit. Jaworski
ripéties de Don Benvenuto, un person- nous fait voir le monde par les yeux
nage que les d’un assassin, non pas motivé par un

Paru en 2009 aux Moutons électriques,
Gagner la guerre de Jean-Philippe
Jaworski a remporté le prix Imaginales
du meilleur roman francophone 2009,
ainsi que le prix du premier roman région
Rhône-Alpes
8

désir de rédemption comme on pourrait le croire, mais suivant sa logique, sa
propre rage de vivre. Ce point de vue si
particulier apporte à l’histoire un dynamisme et un caractère qu’elle n’aurait
pas eu sans cela et qui se ressent même
dans le style d’écriture. Je n’ai pas cessé
d’aller de surprise en surprise, et ai été
emportée jusqu’à la dernière ligne.

Parlons maintenant de l’histoire. Le roman est constitué d’une
trame complexe. J’y ai retrouvé des
intrigues politiques riches, un univers
travaillé, dans lequel la question de la
magie est abordée sous un angle nouveau, plus sombre que dans les récits
de fantasy habituels. Si une grande place
est accordée à la politique, faisant la
part belle aux discours des personnages,
l’histoire n’est pas pour autant avare
d’action. Allant de batailles navales à
des courses poursuites dans les ruelles
étroites de Ciudalia, Gagner la guerre
ne cesse de renouveler l’attention des
lecteurs. Enfin, c’est bien le choix du
narrateur qui donne son piquant à l’œuvre. Je me suis amusée des expressions
de Benvenuto, j’ai été parfois offusquée
par ses actes ou suis restée stupéfaite devant l’intelligence dont il faisait preuve.
Une chose est sûre, le caractère de ce
brigand ne laisse pas de marbre.

Mes seules exigences en commençant ce roman étaient de trouver
un univers travaillé se détachant des
carcans de la fantasy, dans un style correspondant à mes goûts littéraires, à
savoir des phrases ornementées. Après

G É N É R A T I O N

la découverte de Gagner la guerre, j’ai
été irrémédiablement séduite, à tel
point que je me suis surprise à le lire
plusieurs fois.

J’ai fini cette histoire avec un
pincement au cœur, et l’impression
d’avoir vécu une grande aventure.
Ceux qui liront le livre comprendront
pourquoi un sourire est apparu sur mes
lèvres à la dernière ligne, lorsque l’un
des personnages est parvenu à m’étonner par une ultime pirouette.

Le style et l’intrigue de Gagner la guerre :

Même si les ramifications de
l’intrigue sont multiples, celle-ci s’articule principalement autour de Benvenuto. Pendant plus de sept cents pages,
nous voilà donc entraînés dans une
histoire où est pensé chaque détail.
Et une chose est sûre, cette aventure a
le mérite d’être originale. L’intérêt de
Gagner la guerre s’explique grâce au
personnage qui nous guide, puisqu’il
est rare que la parole soit donnée à un
criminel ne se souciant que de sa propre
existence, mais également par les
thèmes abordés. La complexité des
intrigues politiques, les magouilles
étranges dans lesquelles baignent les
protagonistes et les multiples scènes
d’action permettent de dresser un
tableau complet éveillant sans cesse
l’attention du lecteur. Les événements
s’enchainent bien, les transitions sont
maîtrisées et chaque élément a sa place
et son utilité. Dès lors, l’histoire ne
souffre d’aucun temps mort.

Outre l’intrigue, le style de
l’auteur est sans doute ce qui m’a le
plus frappée dans ma lecture. Par sa
justesse, par son travail sur la langue,
Jaworski a su adopter une écriture
qui nous fait savourer chacun de ses
mots. À cela s’ajoute une précision,
presque chirurgicale, quand il s’agit
notamment de parler de blessures
ou de batailles. La rencontre entre
le vocabulaire soutenu de l’auteur et

É C R I T U R E

-

H O R S

celui, familier, de Benvenuto, donne
toute sa couleur à Gagner la guerre.
Ce contraste fait naître des passages
drôles, des expressions cyniques qui
rendent le roman si particulier. Les
descriptions sont un délice et dépeignent au mieux l’environnement
et les pensées des personnages. Les
dialogues suivent le même modèle,
et les mots y prennent toute leur
force. Ils sont maîtrisés et nous permettent de ressentir toute la tension
des conflits politiques. Enfin, ce travail sur le style se remarque dans jeux
littéraires que Jaworski destine à ses
lecteurs comme cela est le cas dans
les noms des villes ou des protagonistes qui ont chacun un sens.

Bien que l’histoire soit centrée sur Bevenuto Gesufal, le roman
nous offre une riche palette de personnages. Gagner la guerre met surtout
en scène des individus de la haute société. On y retrouve des figures politiques et leur entourage, mais tous sont
construits et l’auteur ne verse pas dans
les stéréotypes. Notre maître assassin
rencontre aussi des personnages plus
caractéristiques de la fantasy, tels que
des sorciers sombres et énigmatiques,
qui s’éloignent des sentiers connus
du genre. Certains noms cependant
marquent plus que d’autres, je pense
notamment au patron de Benvenuto,
Leonine Ducatore, homme exécrable
et calculateur qui fait preuve d’une incroyable intelligence et d’une grande
ambition. Il y a également Clarissima
Ducatore, rare figure féminine, à qui
notre brigand fera payer à sa manière
son caractère insupportable. Mais le
coup de maître de l’auteur est d’avoir
su rendre attachant Gesufal, pourtant
dénué de toute morale, qui parvient à
séduire le lecteur.

Le seul point faible de ce roman
est lié à ses qualités. En effet, je vous ai
parlé de la richesse de l’intrigue et des
personnages. Il arrive, en particulier
lorsque certains noms nous échappent,
que des éléments paraissent confus et
9

S É R I E

# 3

qu’il faille reprendre quelques pages en
arrière. Gagner la Guerre n’est pas compliqué en soi, mais il demande tout
de même au lecteur de se concentrer
pour comprendre l’histoire dans son
ensemble.

Fort heureusement, ce petit
défaut est compensé par les points
forts du récit. L’univers nous parait
vraisemblable, tant par ses descriptions que par ses caractéristiques historiques, économiques et politiques.
Il est d’ailleurs inspiré, sur plusieurs
points, des grandes républiques italiennes de la fin du Moyen-Âge. Pour
finir, je dirais que ce n’est autre que
l’incroyable complexité du personnage
et narrateur, son esprit aiguisé et son
audace qui constitue le sel de ce roman.


Quelques mots sur l’éditeur :


D’un point de vue plus formel
cette fois : j’ai été séduite par la couverture réalisée par Arnaud Cremet, qui,
à mon sens, a su remplir son rôle et
s’accorder à l’histoire. Outre ses qualités esthétiques, elle a attiré instantanément mon regard et a attisé ma curiosité. On reconnait dans la réalisation de
ce livre la patte de la maison d’édition
qui met un point d’honneur à produire
des ouvrages de bonne facture. Les
Moutons Électriques sont une maison
d’édition indépendante appartenant
aux Indés de l’imaginaire, collectif
dans lequel on retrouve également les
éditions Mnémos et Actu SF. L’éditeur
lui-même revendique le fait de rechercher des manuscrits innovants, aussi
bien dans le style que l’histoire.


Que faut-il retenir de ce roman ?


En commençant cette chronique, j’ai craint de ne pas pouvoir
aborder tous les points forts de ce livre
tant il y avait de choses à dire. Gagner
la guerre est une œuvre surprenante et
marquante, qui n’épuise pas le lecteur
en dépit de sa taille importante. Elle

L E

P R I N T E M P S

mérite d’être saluée pour la complexité
de son style et de son histoire.

Je suis ressortie bouleversée
de cette lecture, mais aussi incroyablement satisfaite. Lorsqu’on commence
un livre, on passe un pacte avec son
auteur, il doit parvenir à nous faire
voyager, à nous faire croire en son récit. La promesse est tenue ici et c’est
la raison pour laquelle je voulais vous
parler de Jean-Philippe Jaworski.

D E S

J E U N E S

R E P O R T E R S


Ce qu’il faut retenir de cette
œuvre, c’est avant tout la singularité des personnages, et l’emploi
du point de vue interne. Le fait que
le livre soit une sorte de suite de la
nouvelle «  Mauvaise Donne  » de
Jaworski a créé un fort effet d’attente chez le public, car ce sont eux qui
avaient demandé à retrouver Benvenuto. Et ce retour est diablement
réussi.

I N T E R V I E W

D E


J’aurais tendance à conseiller
Gagner la guerre à tous les fervents lecteurs, tant il mérite selon moi d’être
découvert. Les adeptes de la fantasy
s’y retrouveront sans mal, de même
que ceux en quête d’un univers travaillé. Néanmoins, je pense qu’il faut
une certaine maturité et une bonne capacité de lecture étant donné la taille
du roman, mais aussi les thèmes qui y
sont abordés, pour pouvoir apprécier
pleinement cette histoire.

L ’A U T E U R

— JEAN-PHILIPPE JAWORSKI —

Commençons par une question,
qui, je pense, intéresse beaucoup de vos
lecteurs. Quand avez-vous commencé
à écrire ? Qu’est-ce qui a fait naître en
vous ce goût des mots ?


Quand j’ai commencé à soumettre le manuscrit de Janua vera à des
éditeurs, je me suis dit que ma proposition serait plus convaincante si elle était
accompagnée par le projet d’un second
livre dans le même univers. Un roman,

Je dis souvent qu’il s’agit d’une de surcroît, se vend beaucoup mieux
vieille névrose, et ce n’est pas seulement qu’un recueil de nouvelles. C’est pourune plaisanterie. Le désir de raconter, quoi j’ai envisagé l’écriture d’un roman.
étroitement lié au jeu, s’est manifesté
Parlez-nous des origines de
chez moi dès l’enfance. Pour adopter
une hypothèse psychanalytique, il s’agit Gagner la Guerre, comment vous est
sans doute de l’expression de ce que venue l’idée pour ce roman ? Avez-vous
D.W. Winnicott définit comme l’aire tout d’abord songé à la trame de fond 
transitionnelle – ce qu’on appelle cou- ou aux personnages ?
ramment l’imaginaire. Dans Les Mots,
Le Vieux Royaume pré-exisSartre expose très clairement comment
le jeu et l’écriture se nourrissent mutuel- tait aux livres puisqu’il s’agit à l’origine
lement dans le psychisme de certains d’un background de jeu de rôle. Dans
l’univers de jeu, conçu comme un esenfants imaginatifs. J’étais du nombre.
pace rempli de références dérivées de

Gagner la guerre n’est pas votre l’Europe médiévale et de la Renaissance,
première œuvre publiée, vous aviez il me fallait un pôle de civilisation et de
déjà écrit Janua Vera : Récits du Vieux corruption. C’est ce besoin qui a donné
Royaume, qui est un recueil de nouvelles. naissance à Ciudalia, inspirée des granComment s’est faite cette transition entre des républiques italiennes de la fin du
Moyen-Âge. Quelques années plus tard,
la nouvelle et le roman ?
10

quand j’ai entrepris un roman après
avoir écrit Janua Vera, j’ai sondé mes
premiers lecteurs pour connaître leur
nouvelle préférée du recueil. «  Mauvaise donne » et « Le Conte de Suzelle »
arrivaient à peu près ex aequo, mais
comme il m’était difficile de reprendre
le personnage de Suzelle, Benvenuto,
le Podestat et Sassanos se sont imposés
par élimination. Avec de tels personnages et un cadre comme la République
de Ciudalia, l’idée m’est venue très vite
d’écrire l’illustration fantasy de la pensée de Nicolas Machiavel.

Comment s’est déroulée la phase de rédaction ? Et, d’une façon plus générale, de quelle façon parvenez-vous à
faire coïncider votre travail, vos obligations de la vie quotidienne et l’écriture ?

J’ai redécouvert récemment
que les brouillons des premières pages du
roman remontaient à 2004. Je ne m’en
souvenais plus, croyant avoir commencé le roman en 2005. En fait, 2004
a été pour moi une année très dure,

G É N É R A T I O N

touchée par plusieurs deuils et par un
problème de santé relativement grave,
ce qui fait que j’ai interrompu le roman
ébauché pendant un an. L’essentiel du
texte a été écrit entre fin 2005 et fin
2008. Mon éditeur ayant avancé la remise du manuscrit d’un mois et demi
pour pouvoir bénéficier d’une subvention, j’ai dû abattre un travail énorme
à l’automne 2008 – et pour avoir trop
fixé mon écran d’ordinateur, j’ai eu
droit à une rééducation ophtalmique
de six semaines début 2009…

Je ne suis pas mécontent que
vous posiez la question sur la façon
dont je fais coïncider l’écriture avec
une vie par ailleurs tout à fait ordinaire
– c’est-à-dire un poste à temps complet
en cycle terminal au lycée et des obligations familiales. La réponse est toute
simple : je ruine lentement mais sûrement ma santé. Travail en flux tendu,
stress permanent, pas de réelles vacances
depuis 2010. Je suis flatté de lire ou
d’entendre ici où là certains lecteurs se
plaindre du temps que je mets à écrire
mes livres, parce qu’ils lisent très vite
ceux qui sont sortis. Toutefois, à moins
que l’auteur ne soit un génie – ce que je
suis très loin d’être – il y a un paradoxe
qui veut que plus un livre se dévore
vite, plus il a mis de temps à s’écrire. Ce
temps, je le prends sur mon sommeil,
mes loisirs, mes vacances.

On retrouve dans votre roman
une trame complexe et des descriptions
détaillées qui donnent une véritable impression d’authenticité. Vous êtes-vous
inspirés de périodes ou d’événements
historiques pour bâtir cet univers ?

Pour l’écriture de Gagner la guerre,
j’ai employé de nombreuses sources
d’inspiration historiques plus ou moins
digérées et amalgamées. Florence, Venise et Gênes ont fourni des éléments à
Ciudalia ; l’ambition d’un Leonide Ducatore relève du césarisme et possède
des sources d’inspiration antiques (césarienne et augustéenne), renaissance (Ce-

É C R I T U R E

-

H O R S

sare Borgia ou les Médicis), mais aussi
beaucoup plus modernes – raison pour
laquelle une des épigraphes du roman est
de Napoléon Bonaparte. L’ascension du
chef charismatique entouré de crapules
sans morale est aussi une métaphore de
la montée du fascisme  : c’est la raison
pour laquelle le Podestat s’appelle Ducatore, nom que j’ai choisi entre autres
pour sa ressemblance avec Duce, et c’est
pourquoi les milices ciudaliennes s’appellent les Phalanges – par référence à la
Phalange nationale catholique de sinistre
mémoire en Espagne.

Le personnage et narrateur Benvenuto Gesufal est ce qu’on pourrait appeler un anti-héros, un criminel sans scrupules
au physique assez repoussant qui parvient
pourtant à nous émouvoir. Pourquoi avoir
choisi un personnage si sombre ?

Ce n’est pas moi qui l’ai choisi,
c’est le public qui l’a élu ! Je vous renvoie
à ce que j’évoquais plus haut  : quand
j’ai voulu écrire un roman sur le Vieux
Royaume, j’ai été attentif aux retours de
mes premiers lecteurs sur Janua Vera,
et Benvenuto était, avec Suzelle, le personnage le plus populaire. D’une certaine façon, il s’est imposé à moi, et pas
seulement dans Gagner la guerre. Dès
l’origine, Benvenuto a eu une genèse
singulière. Quand j’ai composé les nouvelles de Janua Vera, j’avais pour objectif
de varier les personnages principaux en
reprenant des archétypes romanesques
ou ludiques. Le truand y avait sa place,
mais il m’était très étranger. En tant que
joueur, alors que j’éprouvais une sympathie certaine pour le guerrier, le paladin ou le prêtre, je n’avais aucun atome
crochu avec le voleur. J’ai donc ébauché
une page sur un truand, en utilisant la
première personne par hommage au
roman noir ; je n’avais pas d’idée pour
continuer, je me suis interrompu ; cette
première page a disparu peu après dans
le crash de mon disque dur. Un an plus
tard, j’ai retrouvé une sauvegarde dans
laquelle figurait cet incipit que j’avais
11

S É R I E

# 3

complètement oublié. Le ton m’en a
frappé  : j’ai perçu, alors, la vitalité du
personnage-narrateur. J’ai décidé de le
reprendre et d’écrire son histoire, qui
a donné «  Mauvaise donne  ». C’est
ainsi que Benvenuto s’est imposé à moi
autant que je l’ai conçu.

Par ailleurs, ce que j’ai souhaité faire avec Benvenuto, c’est malmener certains clichés sur le forban au
grand cœur. J’étais un peu las des poncifs du truand justicier, du repenti qui
se rachète une conduite ou du brave
type entraîné malgré lui dans une sale
affaire : on les trouve dans un certain
nombre d’œuvres des littératures de
genre. J’y vois une tartufferie de la part
des auteurs comme du public : on s’encanaille un peu en s’identifiant à un
criminel, mais on ne pousse pas trop
loin le cas de conscience en offrant une
rédemption au truand. J’ai voulu mettre
mon lecteur face à au caractère louche
de sa complaisance : je lui ai offert un
mauvais garçon authentique, aussi séduisant qu’irrécupérable.

Avez-vous versé un peu de
vous-même dans ce roman à la première
personne, ou au contraire êtes-vous
parvenu à garder une certaine distance ?
N’a-t-il pas été difficile de se détacher
du cynisme de Benvenuto pour l’écriture de votre roman suivant, Roi du
monde tome I : Même pas mort ?

J’ai versé très peu de moi-même
dans Gagner la guerre, à part peut-être le
lyrisme et le regret de ne pas avoir fait
fructifier un certain talent pour le dessin.
En revanche, on ne sort jamais indemne
de ses mauvaises fréquentations  ; or,
j’ai fréquenté assidument Benvenuto
pendant plusieurs années. Sur certains
points, il a un peu déteint sur moi  :
pendant quelques temps, par exemple,
j’étais bien proche d’avoir développé un
syndrome de La Tourette…

Effectivement, il n’a pas été évident de se détacher du cynisme de ce
personnage, mais aussi de la petite mu-

L E

P R I N T E M P S

sique benvenutienne. C’était toutefois
indispensable. Il est dommage de réduire
son instrument à une seule partition.

Une fois le travail d’écriture
terminé, comment vous organisez-vous
pour la relecture et la correction ? Considérez-vous cette étape comme difficile ?

En fait, je ne procède pas tout à
fait de cette façon. Comme j’ai un autre
métier qui est assez prenant, j’écris
de façon fragmentée. Après toute interruption dans la composition d’un
manuscrit, j’en relis une grande partie
pour renouer le fil, conserver une certaine unité de ton malgré le caractère
discontinu de mon travail. Ces relectures s’accompagnent naturellement
de repentirs et de corrections. Même
lorsque j’ai l’occasion d’écrire de façon continue, pendant les vacances par
exemple, je reprends toujours le lendemain les pages écrites la veille avant
de poursuivre le récit. Naturellement,
quand le manuscrit est fini, je relis l’ensemble. Idéalement, je préfère laisser
le texte reposer quelque temps avant
de le reprendre, mais je n’en ai pas
toujours le loisir. Je tiens compte également des avis de quelques lecteurs
choisis, même si je dois avouer que j’ai la
nuque un peu roide… La relecture et la
correction présentent une grande difficulté : on est généralement aveugle à
ses propres insuffisances. En ce sens, le
regard d’un tiers est précieux – quand
il est qualifié, car certains correcteurs
vous ajouteraient des erreurs au lieu
d’amender le texte…

Désormais, d’autres de vos livres
sont parus chez Les Moutons Électriques
qui est votre éditeur. Mais à l’origine,
comment s’est déroulée votre quête éditoriale  ? Combien d’éditeurs avez-vous
contactés  ? Quel temps cela vous a-t-il
pris pour obtenir une réponse positive ?

Quand on veut se lancer dans
la carrière des lettres et qu’on ne dispose
d’aucun entregent, ce qui était mon cas,

D E S

J E U N E S

R E P O R T E R S

il faut être endurant aux râteaux. J’ai envoyé quantité de manuscrits par la poste,
j’ai essuyé quantité de refus. Cela a duré
des années. J’ai dû envoyer mes premiers
manuscrits au début des années 1990, et
j’ai publié ma première nouvelle en 2004.
Entre temps, toutefois, j’avais commencé
à publier un peu de jeu de rôle. En fait,
je suis plutôt reconnaissant aux éditeurs
qui ont écarté mes premiers textes  : ils
avaient raison, ils m’ont épargné d’avoir
à rougir d’œuvres de jeunesse remplies
de défauts. Par ailleurs, j’ai eu aussi beaucoup de mal à publier Janua Vera, en particulier parce qu’il s’agissait d’un recueil
de nouvelles et que les nouvelles ne se
vendent pas… Là aussi, j’ai reçu quantité de refus, dont certains très cocasses
qui, avec le recul, me font bien rire – par
exemple, deux lettres du même éditeur
rejetant le même manuscrit reçues le
même jour. C’est très drôle a posteriori,
mais sur le coup, ça vous plombe quand
même joliment le moral. En définitive,
il m’aura fallu un peu plus d’un an pour
placer Janua Vera.

Quels sont vos projets actuels ?
Pouvez-vous nous en dire plus ?

Je travaille sur le deuxième volume de Chasse royale. Pour des raisons
éditoriales, le livre a été coupé en deux
volumes, mais il n’en reste pas moins
un seul et même roman, qui forme la
deuxième branche de mon cycle celtique,
Rois du Monde. Le texte est déjà assez
avancé, même s’il me reste beaucoup
de matière à traiter. Si tout se passe
bien, il sortira à l’automne 2016.


C’est une idée reçue. C’est
surtout une sottise de réduire la qualité
littéraire d’une œuvre à sa thématique.
Penser ainsi, c’est négliger la poétique,
et c’est donc ne pas avoir une réelle
sensibilité littéraire. Comme dans la
littérature dite générale (je ne sais pas
très bien ce que cette étiquette recouvre, d’ailleurs), les œuvres appartenant
aux littératures de l’imaginaire comportent des textes commerciaux, des
ratés et des chefs-d’œuvres.

Pour finir, avez-vous des
conseils à adresser à ceux qui se lancent
dans l’écriture d’un roman, ou bien
dans l’aventure éditoriale ?

Pour écrire un roman, il faut
beaucoup lire, beaucoup écrire et ne
pas négliger de vivre. La ténacité est
également une vertu cardinale, sans
doute plus importante que le talent.
( J’ai rencontré des personnes disposant d’un grand talent littéraire, bien
supérieur au mien, qui n’ont pas percé faute de volonté.) J’y ajouterai le
conseil que Flaubert donnait à Maupassant  ; il est tout simple et pourtant lumineux, en particulier en cette
période de saturation du marché du
livre : « Si on a une originalité, (…)
il faut avant tout la dégager ; si on n’en
a pas, il faut en acquérir une. Le talent
est une longue patience. »

Cette longue patience, on
l’éprouve également dans le démarchage des éditeurs quand on a un
premier roman à publier. Une carrière
d’écrivain est affaire d’entêtement. •


Par simple curiosité, que répondriez-vous aux personnes qui
considèrent la littérature de l’imaginaire comme un sous-genre littéraire ?

En savoir plus sur l’auteur ?
Sur le site de l’éditeur : www.moutons-electriques.fr
Sur Wikipédia : Jean-Philippe Jaworski
12

G É N É R A T I O N

É C R I T U R E

C H R O N I Q U E

-

H O R S

S É R I E

# 3

L I T T É R A I R E

— LES FIANCÉS DE L’HIVER —
par Laure


La première fois que j’ai entendu parler des Fiancés de l’hiver, c’était
sur une chaîne booktube. Et puis j’en ai
entendu parler sur une autre, et encore
une autre. Tous les avis convergeaient
pour dire que le livre était super bien,
que l’on n’avait pas vu d’univers comme celui du livre jusque-là. On restait
même assez mystérieux quant à l’intrigue.
Sans compter que la couverture était
super jolie et que ce château volant ne
pouvait qu’être intrigant. Il n’en a pas
fallu plus pour m’intriguer et me donner envie de lire le livre, avec l’intime
conviction que j’allais adorer…

Ophélie est une jeune femme
un peu discrète, secrète. Elle se fond
dans le décor et ce qu’elle aime le plus,
c’est s’occuper de son musée. Mais voilà qu’on la fiance à un homme du Pôle.
Et le moins que l’on puisse dire, c’est
que son fiancé, Thorn, est aussi ravi
qu’elle de ce mariage arrangé. Pourtant, il va l’emmener avec lui au Pôle,
cet endroit aussi dangereux que glacial.
Et Ophélie va se confronter à la cour,
ses manigances et ses faux-semblants.

plus de 500 pages. Je me suis retrouvée
à vouloir dévorer le livre pour savoir
ce qu’il allait arriver, tout en me retenant tout de même pour quitter le plus
tard possible cet univers merveilleux.
Et Christelle Dabos a réussi à écrire
un livre suffisamment riche pour que
quelques pages arrivent à nous combler. J’ai donc pu savourer ma lecture
comme elle le méritait.


Sans suspens aucun, j’ai adoré
ce livre. Il y a tout ce que j’aime dedans.
Tout d’abord, cet univers fantastique,
qui pourtant a un petit côté historique,
à la fois Belle Époque et à la fois très
xviiie à Versailles. L’histoire en ellemême est très riche, sans pour autant
avoir l’impression que ça fait trop. En
même temps, c’est un beau bébé de


Le personnage d’Ophélie est
sympathique à suivre. Même si elle est
timide et réservée, elle n’est pas pour
autant creuse. C’est un personnage
complexe qu’on aime suivre. Malgré le
fait que la situation lui échappe complètement et qu’elle se retrouve dans
un monde qu’elle ne connait pas, qu’il
y a des enjeux qui la dépassent tota13

lement, je trouve que finalement, elle
s’en sort pas si mal. Alors bien sûr elle
va faire des erreurs, mais j’ai bon espoir
de la voir s’affirmer petit à petit. Et j’ai
l’impression que le changement est
déjà en marche.

Thorn, quant à lui, est un personnage très froid à la carapace blindée.
Ce qui est totalement normal quand
on connait son histoire et que l’on voit
dans quel milieu il évolue. Même s’il
se montre plutôt (carrément) antipathique au début, on finit par percevoir
plus et ce n’est pas pour me déplaire.
J’avoue que c’est le genre de personnage que j’apprécie beaucoup. Je n’ai
qu’une envie, c’est qu’il s’ouvre enfin,
même si je pense qu’il ne le fera que
petit à petit. (Et puis, quand même, il
a des cicatrices !)

Les personnages secondaires
sont tous aussi intéressants, mais je ne
les développerai pas trop, car je pense
vraiment que ce qui fait la force de ce
livre, c’est de sauter dans l’inconnu.
Mais l’important, c’est de savoir que,
même s’ils restent secondaires, ils
sont tout autant travaillés. Pas un n’est
là pour faire potiche et combler le décor. Et je pense qu’il faut faire très attention à Archibald, ambassadeur de
son état, qui promet d’être très sympathique par la suite.

La plume de Christelle Dabos
est juste comme je les adore. Développée sans être complexe. Et parfois,
ici et là, quelques mots désuets sont

L E

P R I N T E M P S

lâchés, et j’adore. Les mots anciens
que plus personne n’utilise sont mes
petites pépites.

L’intrigue est rondement menée, comme je l’ai dit plus haut, chaque
chose est suffisamment développée
pour qu’on ait envie d’en savoir plus,
mais sans qu’on soit frustré toutefois.
C’est comme si l’histoire prenait son
temps pour s’installer, sans se presser.
Pourtant, quand on regarde à la fin, on
se rend compte que plein de choses se
sont passées.

D E S

J E U N E S

R E P O R T E R S


Tout cela fait que je trouve que
ce premier tome de La Passe-Miroir a
complètement répondu aux attentes que
j’en avais. Je suis tombée dans un univers
à la fois riche et passionnant et les personnages et l’intrigue se sont montrés
carrément à la hauteur. Ce fut un beau
coup de cœur et je dois dire que j’attends
avec grande impatience de lire la suite
qui vient juste de sortir. Pour un premier
roman, Christelle Dabos s’en sort haut
la main et je ne peux que lui souhaiter
autant de réussite pour la suite.

Les Disparus du Clairdelune
La Passe-Miroir, T.2

PUBLIÉ CHEZ GALLIMARD JEUNESSE

Le tome 2 de la palpitante saga de Christelle
Dabos est sorti en librairie depuis le 29 octobre
dernier. N’attendez plus et courez retrouver
Ophélie pour la suite de ses aventures !

I N T E R V I E W

D E


Donc si vous aimez plonger
dans de nouveaux univers, je ne peux
que vous conseiller ce livre. Vous allez
voir, suivre Ophélie ne sera pas de tout
repos, et il se peut que, comme elle, vous
n’en ressortiez pas tout à fait indemne.

Pour finir, je remercie grandement Christelle Dabos pour avoir si
rapidement répondu à ma demande
et d’avoir pris le temps de répondre à
mes questions.

LAURÉATE DU CONCOURS
PREMIER ROMAN GALLIMARD
JEUNESSE, RTL ET TÉLÉRAMA

PRIX ELBAKIN.NET 2014
Meilleur roman fantasy
français Jeunesse

Prix littéraire des

collégiens de l’Hérault 2014

L ’A U T E U R

— CHRISTELLE DABOS —
Quelles sont tes plus grandes

Tout d’abord, qu’est-ce qui t’a
inspirations ?
poussée à écrire ?

J’ai été une adolescente plutôt
renfermée et solitaire. Je vivais dans mon
monde, unmondequej’abreuvaisdedessins
animés et de bandes dessinées. Ce monde
intérieur a grandi, grandi, grandi, mais je
souffrais de ne pouvoir le partager avec personne. Arrivée aux années fac, ça a été le Big
Bang ! J’ai enfin rencontré des personnes qui
désiraient connaître ce que j’avais à raconter :
c’est comme ça que j’ai commencé à écrire.
Pour l’amitié et grâce à l’amitié.

studios Ghibli : Le Voyage de Chihiro, Le
Château ambulant, Le Château dans le ciel
ont des ambiances extraordinaires que

J’ai eu un gros coup de cœur j’essaie de retranscrire à travers les mots.
pour les Harry Potter, comme tant
d’autres  ! Ce que j’ai particulièrement
Comment se passe ton processus
adoré (et adopté), c’est d’une part l’as- de création ? Es-tu plus du genre à faire
pect polar magique et d’autre part les si- un plan très détaillé et à le suivre rigoutuations décalées. J’aime aussi beaucoup reusement, à improviser complètement,
l’univers symbolique de Lewis Carroll : ou bien faire un plan et tout de même
Alice au Pays des merveilles et De l’autre laisser de la place à l’improvisation ?
côté du miroir m’ont influencée dans ce
sens. Et en termes de visuel, je suis très
Je suis une adepte du plan flucimprégnée par les films d’animation des tuant. En fait, j’ai d’abord été une grande
14

G É N É R A T I O N

improvisatrice, puis une organisatrice
ultra-rigide, et comme ni l’un ni l’autre
ne me convenaient vraiment, j’ai fini
par couper la poire en deux. Je fais un
synopsis avant de me lancer dans la rédaction : je détermine les grandes étapes
du récit, les trajectoires des personnages,
toutes les idées qui me viennent, mais
c’est l’histoire qui aura le dernier mot !
Un personnage peut évoluer d’une façon
inattendue, par exemple : si je m’aperçois
que le récit y gagne, je n’hésite pas à réajuster tout mon plan en conséquence. Il
y aura toujours un décalage entre ce que
j’ai prévu avant d’écrire et le « processus
de création », comme tu dis si bien : et
c’est ça qui est excitant !

É C R I T U R E

-

H O R S

que je fréquente Plume d’Argent, mon
petit coin de web à moi. Les auteurs, peu
importe qu’ils soient « amateurs », ont
souvent un bon esprit critique : ils ciblent
rapidement les forces et les faiblesses d’un
texte. J’ai reçu beaucoup de commentaires
constructifs qui m’ont permis d’évoluer.
J’ai appris ainsi à travailler mes ambiances,
creuser mes personnages, clarifier mon
style et mieux rythmer ma narration. Un
excellent exercice que je recommande à
tous les auteurs en herbe : soyez bêta-lecteur ! J’ai énormément appris en analysant
et en corrigeant les textes des autres. C’est
l’effet miroir, je suppose.
 

Comment t’es venue l’idée de
La Passe-Miroir ?

S É R I E

# 3


Quel lien entretiens-tu avec tes
personnages ? En as-tu un préféré ?


Je suis une vraie maman poule.
J’ai tendance à vite m’attacher aux personnages que je crée, ce qui n’est pas sans
poser problème. En effet, je dois me faire
violence pour ne pas tous les mettre au
premier plan et pour ne dérouler le fil narratif que des personnages qui contribuent
à faire avancer l’intrigue. J’ai tissé avec
Ophélie un lien empathique très fort : elle
et moi sommes un peu le reflet l’une de
l’autre. Je ne suis pas elle, elle n’est pas moi,
et pourtant nous sommes liées. J’ai un
énorme faible pour Thorn aussi : je me régale à écrire toutes les scènes où il apparaît
et c’est d’autant plus plaisant que je sais
ce qui se passe sous son grand front. Il y

As-tu des petites habitudes

Cette
question
est
parfaitement
a aussi des personnages que j’arrive moins
lorsque tu écris ? Combien de temps asformulée. Je n’ai pas cherché La Passe- à cerner, qui m’échappent un peu : Beretu mis à écrire ton roman ?
miroir, c’est La Passe-miroir qui est litté- nilde m’exaspère souvent et le Chevalier

Des habitudes ? J’en ai probable- ralement venue à moi. À ce moment-là, me met terriblement mal à l’aise !
ment. Par exemple, je n’écris bien qu’au j’étais plongée dans la rédaction d’une  
Quand as-tu su que ton histoire
fond de mon divan, dans le calme plat tout autre histoire dans laquelle je m’en-
de ma maisonnette. Et les pauses Nes- lisais et dont je n’étais pas satisfaite. se raconterait sur plusieurs tomes ?
quik cadencent mes sessions d’écriture Alors que je me promenais dans le peJe savais dès le début que ce
(certains carburent au café, moi c’est le tit bois qui jouxte mon village belge,
j’ai eu la vision soudaine d’un visage en serait une grosse histoire. Avant même
cacao). J’aime prendre mon temps.

Il m’a fallu six mois pour écrire le train de jaillir d’un miroir. Tout est parti d’écrire la première phrase, je m’étais
premier jet du tome 1 de la Passe-miroir et de là ! En quelques instants, Ophélie, fixée comme objectif de ne pas me
une année pour le réécrire. Le tome 2 m’a Thorn, les arches et les familles sont restreindre et d’aller aussi loin que me
réclamé plus de temps. Je l’ai écrit dans des nées. La matière première de mon uni- porterait mon imagination. Au début, je
conditions inédites pour moi. Avant j’écri- vers était là. J’ai laissé tomber le roman ne me posais pas tellement la question
vais sans pression éditoriale et sans prise que je n’arrivais pas à écrire et j’ai foncé en termes de « tomes », mais plutôt de
« mouvements ». En effet, j’ai d’abord
de tête. Là, j’ai senti sur les épaules les at- tête baissée dans la Passe-miroir.
publié La Passe-miroir sur internet avant
tentes des lecteurs et de l’éditeur, et comme
Ton univers est très riche, est-il de trouver un éditeur, et la question de
je ne suis pas débordante de confiance en
moi (je doute facilement), je me suis blo- venu avant les personnages, est-ce l’in- l’impression ne se posait pas tellement.
quée pendant plusieurs mois. Il a fallu que verse, ou bien est-ce que la création des  
deux est un processus lié ?

J’ai vu que tu avais participé
j’apprenne à surmonter mes peurs.
au concours Gallimard Jeunesse, RTL
Univers et personnages me sont et Télérama, que tu as remporté, pour

J’ai vu que tu faisais partie d’une
communauté d’auteurs, est-ce que tu as venus en même temps, mais pas dans les te faire éditer. Comment t’es venue l’envie
partagé tes écris pour avoir des avis ? Trou- mêmes proportions. J’ai rapidement eu une d’y participer  ? Et surtout, comment
ves-tu cela important de partager son ex- idée très précise de la personnalité d’Ophélie, as-tu vécu toute cette aventure ?
périence, ses doutes avec d’autres auteurs ? de celle de Thorn et des pouvoirs familiaux
propres à leurs familles, mais le reste était
Alors, ce n’est pas un aveu facile

Oh que oui  ! La famille et les encore flou. L’univers s’est précisé au fur à faire, mais la vérité est que je n’avais
amis peuvent être d’adorables lecteurs et et à mesure que je suivais les péripéties des pas envie d’y participer. J’avais entendu
leur opinion compte, mais je n’ai jamais personnages : ce sont ces derniers qui sont parler de ce concours par mes amis de
Plume d’Argent  : ils me poussaient à
autant progressé en écriture que depuis le vrai moteur de l’histoire !
15

L E

P R I N T E M P S

D E S

J E U N E S

R E P O R T E R S

participer avec eux et moi, je freinais des
deux pieds. J’avais peur. Dans mon esprit,
être publiée me faisait l’effet d’avancer
seule sur une scène devant des milliers
de spectateurs et timide comme je suis,
cette pensée m’épouvantait. Je n’aurais
jamais eu le cran d’envoyer mon manuscrit si mon compagnon ne m’y avait pas
poussée à son tour. C’est comme ça que
je me suis retrouvée avec mon livre en
librairie quelques mois plus tard. Sur le
coup, d’avoir gagné ce concours m’a un
peu affolée, mais au final, ça m’a fait un
bien considérable. J’ai dû me confronter
à ma peur du regard des autres, affronter
des situations dont je me croyais incapable (prendre la parole à la radio, poser
devant des photographes professionnels)
et encore maintenant il m’arrive de faire
des crises de panique quand je sens sur
moi les attentes des autres. Mais toutes ces
peurs, tous ces doutes disparaissent dès je
rencontre mes lecteurs. De voir ces jeunes
(et ces moins jeunes) venir à moi avec, au
fond de leur regard, le reflet de mon propre
univers, ça me transporte. Ces rencontreslà sont tellement magiques qu’elles me
permettent d’affronter tout le reste !
 

Qu’est-ce que ça t’a fait d’avoir
ton roman entre les mains ?

de table, en pensant à autre chose ! Non,
je me dois de mettre tout mon cœur et
toutes mes tripes dans ce que j’écris. Si je
ne suis pas la première emballée par ce
que je fais, je dois recommencer encore et
encore, revenir sur ma copie autant de fois
que nécessaire. Je ne peux pas promettre
aux lecteurs d’écrire pour eux l’histoire
idéale, mais je peux au moins leur promettre d’écrire une histoire sincère.

Concernant l’accueil du premier
tome de La Passe-miroir, je dois dire ce
qui est : j’ai été archi-gâtée. Beaucoup de
lecteurs ont pris le temps de me faire part
de leur enthousiasme et ça m’a beaucoup
encouragée. Maintenant, il n’est pas tout à
fait exact de dire que je n’ai eu aucun avis
négatif sur mon roman. Il y a aussi des
lecteurs qui n’ont pas été séduits et c’est
bien normal. Certains trouvent le début
beaucoup trop long à se mettre en place,
d’autres n’ont pas accroché à mes personnages principaux. J’essaie de tirer un enseignement des critiques qu’on me fait : elles
ont souvent un fond de vérité et même si
je ne le digère pas sur le moment (ah, ego,
quand tu nous tiens), une fois que je les ai
intégrées ça m’aide à progresser.
 

Quel est ton plus beau souvenir
lié à ton roman ?


Honnêtement ? Un drôle d’effet.
À chaque fois que je manipule mon livre,
que je vois cette magnifique couverture,
cette histoire d’encre et de papier, j’ai
l’impression que c’est un malentendu,
que ça appartient à quelqu’un d’autre. Le
simple fait d’en lire quelques phrases me
fait devenir écarlate, un peu comme ces
rêves où on s’aperçoit soudain qu’on est
sans vêtements dans la rue.
 

Jusque-là, je ne crois pas avoir
vu un seul avis négatif ou mitigé à propos de ton roman, tous sont très positifs.
Appréhendais-tu l’avis de tes lecteurs ?


Tiens, c’est la première fois qu’on
me pose cette question et je m’aperçois
que j’ai du mal à y répondre ! Comment
dire  ? Mon histoire est tellement inscrite
dans ma vie quotidienne qu’elle finit par
devenir une vraie colocataire. Je dors avec
elle, je mange avec elle, je me promène avec
elle, je peste avec elle et au final nous vivons
tellement de choses ensemble, elle et moi,
que je n’arrive pas à dégager un événement
marquant en particulier. Des moments
forts, ça oui, on en a eu. Quand j’écris dans
un tel état de transe que j’en ai des frissons
partout, par exemple. Ou alors quand je
viens enfin à bout d’un chapitre qui m’a fait


Dès lors que j’ai accepté l’idée
d’être éditée, je me suis sentie engagée
vis-à-vis des lecteurs. Hors de question
d’écrire du bout des doigts, sur un coin

suer sang et eau. Ou alors quand mes amies
de Plume d’Argent se tapent des délires inavouables sur mes personnages (et c’est toujours Thorn qui prend, d’ailleurs). Ou alors
quand je reçois des dessins-surprise de mes
lecteurs. Ou alors quand mon compagnon,
qui ne lit jamais de fantastique, se coltine
les 500 pages de mon roman et me déclare
qu’il a aimé. Tout ça, ça a été de sacrés battements de cœur !
 

Quel conseil donnerais-tu aux
jeunes auteurs ?

Faites-vous plaisir. C’est un
conseil qui peut sembler naïf, mais c’est
celui que je me donne continuellement à
moi-même. Le plaisir doit rester au cœur
de l’acte de l’écriture et il est très facile de
le perdre de vue. C’est incroyable les souffrances qu’on s’inflige parfois quand on
est auteur. On veut écrire une histoire SI
originale, SI intéressante, SI parfaite qu’on
en oublie ce qui, nous, nous faisait vibrer
à l’origine. Ne cherchez pas à satisfaire les
attentes des autres. Écrivez sur des sujets
qui vous parlent, avec le style qui vous
convient, autour de personnages qui vous
emportent. Trouvez ce qui vous enthousiasme et préservez-le précieusement.
 

Pour finir, le tome 2 sort en novembre, as-tu hâte ? Que peux-tu nous
dire à son propos ?

Ah, ah, j’ai le trac. Et en même
temps, je me sens en paix. J’ai donné
tout ce que j’ai dans le ventre pour écrire
cette suite et je suis vraiment passée par
tous les états d’âme. Je ne sais pas si ce
tome va plaire autant que le premier
(les attentes sont grandes !), mais j’y ai
mis le meilleur de moi-même. Tout ce
qu’Ophélie vit et ressent dans l’histoire,
je l’ai vécu et ressenti avec elle. Je croise
mon écharpe pour que les lecteurs le
vivent et le ressentent à leur tour ! •

Où suivre Christelle Dabos ?
Sur son site internet : www.passe-miroir.com
Sur Facebook : La Passe Miroir
16

G É N É R A T I O N

É C R I T U R E

C H R O N I Q U E

-

H O R S

S É R I E

# 3

L I T T É R A I R E

— LUNE MAUVE —
par Lizzie K.


« Un seul coup d’œil m’avait suffi pour constater que j’étais la fille la plus mal fagotée du bahut. Moi, Séléné
Savel, à Darcourt, le lycée le plus snob de Paris ? Je m’y donnais autant de chances de survie qu’une souris lâchée dans un
enclos de chats affamés !

J’étais plongée dans mes pensées moroses lorsqu’une élève me bouscula. Là où elle m’avait touchée, la peau me démangeait d’une vibration électrique. Un visage s’insinua dans mon esprit, celui d’un inconnu aux iris aussi verts et froids
que ceux d’un serpent, puis il s’effaça aussitôt.

Je retins ma respiration.

Ma nouvelle vie était sur le point de commencer. »


Prenez une fille de quinze, seize
ans. Bretonne, la fille. Mettez-la dans un
lycée ultra-sélect des quartiers chics de
Paris, donnez-lui un père intellectuel,
une grand-mère mondaine, une cousine
un peu peste sur les bords, une mère disparue et, accessoirement, le destin d’un
monde parallèle sur les épaules. Oh,
n’oubliez pas non plus le beau rockeur
ténébreux. Ça y est, vous voyez le topo ?
Parfait. Vous êtes fin prêt(e) pour vous
plonger dans l’univers de Lune Mauve,
de Marilou Aznar.

Bien. Maintenant que je vous
ai mis l’eau à la bouche, il est temps
pour moi de vous dire à quel point j’ai
aimé cette série. Car oui, pourquoi se
contenter d’un seul tome quand on
peut en écrire quatre ? C’est donc une
tétralogie complète que nous propose
Marilou Aznar.

Si je devais résumer cette œuvre en un mot, je dirais qu’elle est originale. Pas en tous points, je vous l’accorde.
On retrouve, par exemple, le cliché de
la jeune fille qui se retrouve projetée

dans un milieu bourgeois dans lequel
Car si, comme moi, vous êtes
elle n’arrive pas à trouver sa place et devenu incollable sur la mythologie
où on lui fait bien comprendre qu’elle grecque à force de lire des romans fantastiques en mal d’originalité, vous ne
pourrez pas passer à côté de cette série.
Un vent de fraîcheur arrive dans votre
bibliothèque : oubliez centaures, nymphes et autres créatures mythiques, et
laissez place aux légendes de la Mésopotamie et de la Perse – de l’Iran antique,
si vous préférez. Votre imagination et
votre culture générale vous en remercieront. Ici, ce sont le dieu Marduk et la
déesse Ishtar qui sont à l’honneur. Leaders des deux clans antagonistes, incarnations du Bien et du Mal, le premier
tente de revenir à la vie tandis que la
seconde fait de son mieux pour préserver l’équilibre. Exit les dieux grecs qui
passent le temps en multiples disputes
et histoires amoureuses, dites bonjour
à la guerre, la vraie ! Et elle est d’autant
n’est pas la bienvenue. Le cliché de la plus intéressante que les événements
fille qui est promise à un destin hors du d’un monde influent sur ceux de l’autre.
commun. Mais de nombreux points Par exemple, des maladies inconnues
viennent contrebalancer tout cela.
s’abattent sur Viridan, le monde ima17

L E

P R I N T E M P S

giné par Marilou Aznar, tandis que les
disciples de Marduk se démènent sur
Terre pour le ressusciter.

D’un point de vue plus technique, je trouve que l’auteur a un style
très agréable. La narration est lente et
posée, mais ce n’est pas ennuyeux, au
contraire ! Cela n’est que plus intéressant. On sent qu’elle prend son temps
pour exprimer au mieux le fond de sa
pensée, même lorsqu’elle décrit des
phénomènes surnaturels. On croirait
presque qu’ils pourraient se produire
sous nos yeux. L’histoire évolue à un
bon rythme. Et dieu sait que je trouve
souvent que les événements s’enchaînent
trop rapidement  ! Ici, tout va bien.
L’intrigue avance, et prend un tournant inattendu à la fin du premier tome
(ça vous donne envie de lire ? Mais oui,
ça vous donne envie de lire). Les descriptions sont bien fournies, tant pour
le physique des personnages que pour
les décors. On n’a aucun mal à se représenter les lieux et les protagonistes. Encore une fois, tout cela est raconté avec
beaucoup de simplicité, sans figures de

D E S

J E U N E S

R E P O R T E R S

style lourdes ou forcées. Une petite intrigue secondaire est menée en parallèle dans le premier opus, ce qui n’est
pas pour nous déplaire non plus.

Bien que le personnage de
l’héroïne, Séléné, soit assez développé, les autres ne sont pas en reste. J’ai
particulièrement apprécié Alexia, la
cousine un peu pimbêche qu’on se fait
un plaisir de détester, mais qui montre
malgré tout une certaine part d’humanité. Je crois même que c’est mon
personnage préféré, avec Laszlo. Mais
pour expliquer les raisons de ce choix,
il faudrait que j’entre dans les détails
de l’histoire, ce que je ne puis absolument pas faire. À vous de voir ! Disons
simplement qu’ils sont plus complexes
qu’il y parait au premier abord.

Mais accrochez-vous bien, mes
amis ! Car une fois que vous aurez terminé ce tome-ci, vous serez définitivement absorbé par l’univers de Marilou
Aznar. Car le premier volume n’est en
réalité là que pour poser le décor, nous
présenter les personnages, le but de
leur quête. C’est l’élément initiateur, en

I N T E R V I E W

D E

somme. Là où les sept tomes de Harry
Potter pouvaient plus ou moins se lire
séparément, Lune mauve doit se lire
dans l’ordre, sous peine de rater des informations cruciales. Elles sont savamment distillées tout au long de l’aventure,
et pour en savoir plus, pas d’autre choix
que de lire la suite. C’est qu’elle en a,
des choses à dire, cette auteure ! Et on
la remercie grandement pour ces belles
histoires qu’elle nous offre.

Enfin, si je devais évoquer des
éléments qui m’auraient déplu, je dirais
qu’il m’est parfois arrivé de m’énerve
contre Séléné. Certains de ses choix,
de ses réactions, me paraissent irréfléchis, mais cela fait partie de son caractère spontané. Elle n’en est finalement
que plus humaine.

Pour agrémenter cette chronique,
j’ai eu le plaisir de poser quelques questions à Marilou Aznar, et c’est avec une
grande gentillesse qu’elle m’a répondu.
Cet échange s’est avéré très instructif pour moi, j’espère qu’il en sera de
même pour vous.

L ’A U T E U R

— MARILOU AZNAR —

Quel a été votre parcours (étu- métier et de me lancer dans l’adaptades, professions, etc.) avant de parvenir tion de séries et de films (je traduis les
où vous en êtes aujourd’hui ?
dialogues de l’espagnol et de l’anglais
vers le français) en freelance. C’est en

Après des études en finance écrivant les dialogues de ces adaptaet un passage en cabinet d’audit, j’ai tions que j’ai renoué avec l’écriture, et
longtemps travaillé dans une maison que je me suis lancée dans l’aventure
de disques. Le rock est ma seconde Lune mauve.
passion. Un jour, j’ai voulu faire quelque chose de plus créatif, de plus per-
Comment vous est venue l’idée
sonnel. J’ai décidé alors de changer de de Lune Mauve ?
18


J’ai commencé à jeter les premières idées sur le papier et, très vite,
des images me sont venues. La mer
déchainée, la lande, une fille secrète
et un peu sauvage, un lycée privé très
select, un temple sur la falaise, une civilisation oubliée, un monde relié au
nôtre par un mystérieux passage…
C’est en gardant ces images en tête
que j’ai écrit le premier et le dernier
chapitre du roman.

G É N É R A T I O N


Combien de temps avez-vous
mis avant de terminer et de faire éditer
le premier volume ?

En tout, je dirais un an en
comptant les pauses.

Lune Mauve est mon premier
roman. On m’avait tellement répété que les chances de publication
étaient faibles que je ne m’attendais
pas vraiment à obtenir une réponse
positive. Et encore moins après mon
tout premier envoi de manuscrit  !
Cette mise en garde m’a toutefois
été précieuse. Pour mettre toutes les
chances de mon côté, je me suis efforcée de peaufiner mon manuscrit
au maximum avant de le soumettre
aux éditeurs. Je n’avais pas beaucoup
d’expérience alors j’ai un peu tâtonné au début, alternant des phases
d’euphorie et des phases de doute.

FICHE AUTEUR :
MARILOU AZNAR
Passionnée de rock, Marilou
Aznar a longtemps travaillé
dans le milieu du disque. Poussée par l’envie de faire quelque
chose de plus personnel, elle
décide de changer de métier,
et se reconvertit dans l’adaptation de séries et de films. C’est
en écrivant les dialogues de ces
adaptations qu’elle renoue avec
l’écriture… et se lance dans
l’aventure de Lune mauve, son
premier roman.
La Messagère, l’ultime tome
de la tétralogie Lune Mauve, est
sorti en librairie le 7 octobre
dernier et vient conclure une
aventure de près de trois ans.
Source :
bloglunemauve.wordpress.com

É C R I T U R E

-

H O R S


J’ai commencé bille en tête
avec encore une idée très vague de l’intrigue puis, au bout de quelques chapitres, j’ai fait une pause assez longue.
Quand j’ai eu un peu de temps à nouveau, j’ai alors repris le synopsis pour
le développer, afin de pouvoir avancer
dans la rédaction. J’avais besoin de savoir où j’allais pour continuer à écrire
cette histoire. J’ai fini le premier jet au
bout de quelques mois, et je l’ai laissé
sur mon ordi pendant deux ou trois
semaines. Ensuite je me suis décidée
à le faire lire autour de moi, et cela a
été une libération. Les remarques que
m’ont faites ces premiers lecteurs m’ont
été précieuses pour améliorer le texte,
jusqu’à ce que j’en sois suffisamment
satisfaite pour l’envoyer à des éditeurs.

Je ne connaissais personne
dans le milieu de l’édition. J’ai envoyé
le manuscrit de Lune Mauve par la Poste
(ou sur Internet quand c’était possible)
à une dizaine d’éditeurs jeunesse, ceux
dont j’avais entendu parler et quelques
autres que j’ai découvert en flânant
dans les librairies. J’ai reçu quelques
lettres types de refus au début, assez
décourageantes. Mais ensuite les quelques
lettres personnalisées d’éditeurs qui me
proposaient des lignes directrices pour
le reprendre m’ont redonné espoir. J’ai
donc retravaillé le manuscrit avec les
conseils reçus. C’est alors que Casterman m’a contactée, un peu moins de
trois mois après l’envoi du roman. Une
autre maison d’édition s’est montrée
intéressée un peu plus tard, mais j’avais
déjà rencontré mon éditrice actuelle et
pris la décision de continuer l’aventure
avec elle.

J’ai beaucoup de chance !

S É R I E

# 3


J’écris sur ordinateur et sur
tablette. Très peu sur papier sauf pour
prendre des notes quand je n’ai rien
d’autre à portée de main. J’écoute
beaucoup de musique, mais surtout
avant d’écrire pour faire venir les mots,
la musique me déconcentre quand je
suis en phase de rédaction. Souvent je
tâtonne, je commence un chapitre, je le
laisse de côté pour écrire une scène qui
vient plus loin dans le récit, je reprends
le début pour l’affiner. C’est une sorte
de patchwork que j’assemble et que je
réécris au fur et à mesure.

On a souvent vu des romans basés sur la mythologie grecque ou romaine ;
votre tétralogie se démarque en prenant
appui sur les légendes mésopotamiennes.
D’où cet intérêt vous vient-il ?


Les civilisations disparues
m’ont toujours fascinée. Enfant, je
voulais être archéologue ! J’adore l’aile
des Antiquités orientales du Louvre
qui compte des chefs-d’œuvre des civilisations mésopotamiennes. C’est
pour cela que j’ai décidé de revisiter
les mythes sumériens dans le roman.
Je voulais opposer deux univers dans
le livre, celui très ancré dans le monde
réel d’un lycée privé parisien avec ses
clans, les fêtes, et un ailleurs mystérieux, plein d’étrangeté mais avec un
aspect historique. Voilà comment j’ai
imaginé ce monde relié à la Terre par
un passage. Un monde où la civilisation babylonienne a continué à se développer, sous l’influence d’une lune
intelligente révérée comme la déesse
Ishtar, et au destin duquel Séléné va se
trouver liée.

Les civilisations mésopota
Lorsque vous écrivez, arrivez- miennes sont très riches et assez peu
vous toujours à parfaitement transcrire explorées  : j’aime le mélange d’hévos idées ?
roïsme et de cruauté de leurs légendes.
C’est aussi un univers très riche visuel
Ce n’est pas toujours facile de lement, fastueux et exotique.
retranscrire exactement ce que l’on a
en tête. C’est mon plus grand défi en ce
En quel personnage vous requi concerne l’écriture de trouver les connaissez-vous le plus ?
mots, les phrases justes.
19

L E

P R I N T E M P S


J’ai mis quelque chose de moimême dans tous mes personnages,
même s’ils sont tous des constructions
complètes. Je m’inspire à la fois de personnes réelles et de héros de fiction qui
m’ont fait rêver pour assembler leurs
caractéristiques psychologiques. Ce
sont des puzzles.

Ensuite, je me demande comment ils réagiraient s’ils existaient
vraiment afin de travailler leur psychologie. C’est comme ça qu’ils évoluent
jusqu’à ce que je les trouve crédibles.
L’idée n’est pas de copier la réalité mais
de rendre la fiction, aussi fantastique
soit-elle, crédible et cohérente.

Sinon, je n’ai pas vraiment
de personnage préféré. J’hésite entre
Séléné, parce qu’elle est lucide et romantique, et Thomas (j’ai toujours eu
un faible pour les musiciens !). Sinon,
j’ai beaucoup d’affection pour Cleo,
Vadim, Rimbaud, le père de Séléné, et
assez étrangement pour Alexia.

Comment réagissez-vous lorsque
vous recevez des critiques négatives  ?
Cela vous influence-t-il dans votre manière d’écrire ?

Cela me fait toujours quelque
chose de savoir que des inconnus
tournent les pages de mon livre. Toutes
les critiques, qu’elles soient positives
ou négatives, me touchent beaucoup.
Ce n’est pas évident de confronter son
univers resté secret de longs mois aux
yeux des lecteurs.

J’accueille de bonne grâce les
critiques négatives et j’essaye de les
prendre en compte si elles sont pertinentes à mes yeux. C’est un processus
sain (mais parfois douloureux) de se
confronter aux opinons de ses lecteurs,
on ne peut que progresser dans son
écriture. Mais quoiqu’il en soit, je suis
convaincue que l’on ne peut pas plaire
à tout le monde. Un livre, c’est plus
qu’une histoire, c’est le reflet d’une
sensibilité. Certains lecteurs ne sont



D E S

J E U N E S

R E P O R T E R S

Curieux ?



Découvrez les trois premiers
chapitres du premier tome de Lune
Mauve en ligne en suivant sur le blog de
l’auteur : bloglunemauve.wordpress.com

Le fond
pas sensibles à mon univers et c’est très
Demandez à vos lecteurs de
bien comme ça  ! La diversité est une
vous signaler les passages ennuyeux
richesse en littérature.
et confus, les incohérences, les in
Savez-vous que beaucoup vraisemblances dans l’action et dans
d’adolescents et jeunes adultes postent la psychologie des personnages. Le
leur roman sur Internet, afin d’obtenir sujet est-il assez fort pour les pousser
de premiers avis ? Qu’en pensez-vous ? à poursuivre leur lecture  ? L’histoire
tient-elle la route  ? Les personnages

C’est une excellente initiative. sont-ils attachants? Le texte original et
Il existe des forums tels CoCyclics ou la voix intéressante ?
Votre premier chapitre doit
le Co-Lecteur où on peut poster des
extraits (pas sûr qu’il soit utile de pos- tendre vers la perfection, c’est la carte
ter le roman en entier). Les remarques de visite de votre livre. Idéalement, à
faites par les bêta-lecteurs sont toujours la fin de ce chapitre, le lecteur doit être
très utiles. Grâce à eux, il est possible suffisamment intrigué et pris par l’hisde tester son scénario, d’épurer son toire pour continuer à lire. Soignez
style et de corriger ses tics d’écriture. également votre fin. Les comités de
Mais il faut toutefois bien se connaître lecture n’ont pas le temps de lire en enet avoir confiance en soi, afin de ne pas tier tous les manuscrits qu’ils reçoivent,
se laisser miner par les critiques négatives. alors il faut leur donner l’envie de se
Pour moi, il est essentiel de se faire re- plonger dans votre roman.
lire. Et pour que l’exercice soit utile, il
Le style
faut aborder le processus avec humi-
Le mieux est l’ennemi du bien.
lité, sang-froid et lucidité. Toutes les
critiques ne sont pas pertinentes, mais Un mot précis et bien employé vaut
quand un consensus se dégage, il faut mieux que deux qualificatifs approximatifs, les adverbes sont à utiliser
savoir se remettre en question.
avec modération, attention à l’abus de
 

Auriez-vous un conseil à donner clichés (littéraires ou autres). Traquez
à ceux qui voudraient devenir écrivain ? les fautes de syntaxe et d’orthographe,
elles défigurent votre manuscrit. Un
premier gros tri est effectué sur le ni(5 conseils, attention, c’est long !)
veau de langue.


1- La relecture, c’est la clé
2- L’information est un atout

Lisez, relisez et faites lire vo-
tre manuscrit autour de vous. Un bon précieux
N’hésitez pas à traîner dans les
truc (si vous en avez le courage), c’est
de lire le texte à haute voix pour en tra- librairies et sur les sites de vos éditeurs
préférés. Vous aurez ainsi un aperçu
quer toutes les imperfections.
20

G É N É R A T I O N

des romans qui ont séduit les comités
de lecture (quelle qu’en soit la raison).
Feuilletez-les, étudiez-en la structure
(chapitres, nombre de pages, etc.), lisez-les si possible : qu’est-ce qui vous
plait ou vous déplait dans ces livres  ?
Qu’est-ce qui fait que vous ne pouvezvous empêcher de tourner les pages
(ou au contraire de reposer le livre sans
autre forme de procès ?).

Appliquez cette attitude de
« lecteur pur » à votre livre.

L’achèteriez-vous si vous le
trouviez sur la table de votre libraire ?
Chez quel éditeur pourrait-il paraître
en toute cohérence ? Cela vous permettra à la fois d’avoir un avis plus neutre
sur votre roman et aussi d’éviter d’envoyer votre manuscrit chez un éditeur
qui ne lui convient pas (et vice-versa).

3- Le manuscrit doit être réglementaire

Votre manuscrit doit être
conforme «  techniquement  » à ce
que demandent les comités de lecture.
Les directives sont souvent données
sur les sites des maisons d’édition,
n’hésitez pas à les consulter. Pour résumer, plus c’est neutre, mieux c’est !
La page de garde doit comporter vos
coordonnées, le titre du roman, votre
nom (préciser pseudo si c’est votre
souhait), et le nombre de signes espaces comprises.

É C R I T U R E

-

H O R S

S É R I E

# 3

DO
présente votre manuscrit, c’est souvent
le premier texte qu’on lira de vous (et
• Personnalisez la lettre en inparfois le seul). Elle doit être claire et
cluant une phrase sur l’éditeur à qui
sobre, et sans fautes d’orthographe.
vous envoyez le manuscrit, cela montre
que vous avez fait des recherches et

DON’T
que vous pensez que le manuscrit cor
• Ne vous mettez pas en respond à leur ligne éditoriale.
avant, sauf si votre expérience ou vos
• Incluez une phrase ou deux
compétences sont un plus pour le ma-
nuscrit (ex  : vous êtes un pompier, pour résumer le roman dans le corps de
neurochirurgien, policier qui écrit un la lettre, si elles sont bien tournées, ça ne
thriller situé dans ce milieu) et encore. peut pas faire de mal. Avant de se lancer,
Ne parlez pas de vos amis et de votre il faut maîtriser l’art délicat du pitch.
famille (ma belle-mère a adoré le ro• Terminez par les formules de
man, etc.). Le plus important, c’est le
politesse habituelles.
manuscrit, pas vous.

• Évitez de vous vanter et de
comparer le roman à des succès commerciaux (« mon roman, Le codex de
Pont-à-Mousson, c’est le Da Vinci Code
en mieux », etc.).

• Ne soyez pas agressif («  si
tu le lis pas, c’est ton choix mais je sais
où tu habites  »), défaitiste («  je sais
que c’est un peu nul, mais qui ne tente
rien… »), conspirationniste (« je sais
que vous allez caler une table avec parce
que ça ne marche que par copinage,
mais à tout hasard… »).


5 – Résistez aux sirènes de l’édition à compte d’auteur et autres éditeurs
qui ne le sont que de nom.

• L’édition à compte d’auteur,
c’est le mal !

• Un bon éditeur ne vous demande pas d’argent, il vous en verse.

• Un bon éditeur ne vous demande pas de faire les corrections du livre.

• Un bon éditeur ne vous demande pas de faire vous-même toute la
promotion du livre.

• Un bon éditeur ne vous demande pas de vendre le livre à sa place : il
dispose d’un bon réseau de distribution.


• Ne harcelez pas les éditeurs
par mail ou téléphone, c’est contre-
productif. Ils ne vous doivent rien,

4- La lettre d’accompagnement et n’étant ni conseillers littéraires, ni
la communication avec les éditeurs sollicités. bénévoles dans un atelier d’écriture,

La lettre d’accompagnement ni psy.

À vous de jouer ! •

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21

L E

P R I N T E M P S

D E S

J E U N E S

C H R O N I Q U E

R E P O R T E R S

L I T T É R A I R E

— LES OUTREPASSEURS —
par Joshiroo


Après nombre de critiques favorables et de bouche-à-oreille positifs, il est temps de se plonger dans cet
univers qui nous ouvre les bras  : Les
Outrepasseurs. Dès le début, on est intrigué par cette couverture magnifique
et pourtant très simple. Et la magie
opère immédiatement.

Publié aux éditions Gulf
Stream, le livre nous raconte l’histoire
de Peter, jeune homme dont l’âge ne
nous est pas clairement précisé, qui,
après un attentat chez lui, découvre
une société secrète dont il est l’un des
descendants. Les membres de cette
société ont le pouvoir, après une malédiction, de se transformer en certains
animaux. Lui ainsi que d’autres jeunes
sont alors convoqués pour découvrir
les origines de leurs familles.

Par où commencer  ? Cindy
Wilder possède une plume magique,
poétique et très envoûtante, toute en
simplicité mais néanmoins travaillée.
La manière dont elle écrit son histoire
est très intéressante. Peter, le héros du
roman, est presque considéré, dans ce
premier tome, comme un personnage
secondaire, car l’aventure que l’on suit
réellement est celle de l’origine de la
société des Outrepasseurs. Peter et les
autres personnages ne sont qu’au second
plan, des pauses dans « l’histoire des origines  » qui permettent aux lecteurs de
respirer et d’intégrer les informations,
comme le font d’ailleurs les adolescents.


Peter est peu développé, ce qui
est normal car le tome se concentre
sur le passé. C’est une façon originale
de découvrir le passé des héros que
l’on doit suivre. Car, habituellement, le
passé des personnages nous est raconté petit à petit par ceux-ci à travers des
récits, des souvenirs ou des flash-backs
qui nous permettent alors de mieux
comprendre leurs motivations. Ici,
toutes les informations importantes
nous sont données dès le départ pour
nous permettre certainement plus tard
de mieux comprendre les décisions et
les choix des héros que l’on suivra.

Et, bien que l’on ne ressente
rien de particulier pour Peter, beaucoup d’empathie se développe pour
Niels et les autres. On ressent la même
colère quand ils sont chassés par les
humains, la même tristesse, la même
rage quand ils sont trahis. C’est très
impressionnant, très poignant. On découvre aussi «  les ennemis  », les fés,
qui ne nous sont même pas présenté
du point de vue de Niels mais bien des
fés eux-mêmes, nous permettant de
mieux comprendre leur mode de vie et
leurs choix. Au point qu’on ne sait pas
où se placer, qu’on ne discerne pas les
méchants des gentils, personne n’est
tout blanc ou tout noir.

Le seul bémol découvert est
le manque de développement des personnages du présent et les chapitres très
courts qui leur sont accordés, bien que
cela serve l’histoire qui nous est contée
et que cela change dès le second tome.
22


Un roman à la plume magnifique
et vibrante, une façon de raconter une
histoire originale, des personnages
attachants et intrigants. Ce sont tous
les ingrédients nécessaires pour nous
promettre un tome extraordinaire et
une suite spectaculaire. Une trilogie
incontournable et un splendide coup
de cœur.

LES OUTREPASSEURS
tome 1 - les héritiers
Prix Imaginales 2014
(catégorie jeunesse)
• Nominé pour le prix Elbakin
2014, catégorie roman jeunesse
francophone
• Nominé pour le prix Futuriales
des Lycéens 2015
• Nominé pour la première sélection du GPI (Grand Prix de l’Imaginaire) 2015, catégorie roman jeunesse francophone
• Nominé pour le prix Chimère,
catégorie 15/18 ans

G É N É R A T I O N

É C R I T U R E

I N T E R V I E W

D E

-

H O R S

S É R I E

# 3

L’A U T E U R

— CINDY VAN WILDER —


Pour commencer, pourrais-tu
te présenter pour ceux qui ne te connaîtraient pas ?

DÉCOUVREZ LA SAGA
LES OUTREPASSEURS


Donc, Cindy, 32 ans, auteur
de la saga des Outrepasseurs chez Gulf
Stream Éditeur, je cohabite au quotidien avec Muse et mon chat (qui parfois, d’ailleurs, se confondent en une
seule et même bestiole… On se demande pourquoi !)


• Sur le site de l’éditeur
• Sur la communauté Livraddicts
• Sur la communauté Booknode


Comment as-tu commencé
l’écriture ?

Comment est né Les Outrepasseurs ?


À la base, c’était un défi : don
J’ai commencé l’écriture très ner ma propre version des contes de
tôt – je vais être très originale dans ma fées… lancé par une amie qui en avait
réponse ;) – mais je ne m’y suis mise certainement assez de m’entendre râler
sérieusement, dans le sens « commen- sur les versions Disney ! Ce projet s’est
cer un projet et ne pas l’abandonner très vite développé, a pris une vie propre
après dix pages », que lorsque j’ai été et m’a embarquée dans une aventure
impliquée dans la gestion de CoCy- que j’étais loin de soupçonner.
clics, un forum d’entraide pour auteurs
As-tu une anecdote sur la créadébutants amateurs d’imaginaire ! Il y
régnait (et y règne toujours d’ailleurs !) tion des Outrepasseurs ?
une telle émulation, un tel enthousias
Oh, plein… Comme mon étonme que je me suis lancée. 
nement quand j’ai commencé à mener
mes recherches historiques, puisqu’une
grande partie de l’intrigue du tome 1 se
COCYCLICS
passe dans la France du xiiie siècle ! J’ai
collectif des bêta-lecteurs
eu l’occasion de pouvoir casser tous les
de l’Imaginaire
préjugés que j’avais encore sur cette époque… Ou encore que la première version
Communauté basée sur l’échange et
l’entraide entre amoureux de l’imaginaire
de ce tome doit beaucoup au challenge
(auteurs et lecteurs) pour améliorer des textes
NaNoWriMo, qui a lieu chaque novemen pratiquant la bêta-lecture.
bre et qui consiste à écrire 50 000 mots en
Site internet : cocyclics.org
30 jours… J’adore ce défi annuel !
23


Quel est le livre qui t’a donné le
plus de plaisir dans l’écriture ?

Tous, à leur manière, m’ont procuré beaucoup de plaisir et de satisfaction. Voir ses personnages prendre vie, les
découvrir aussi, développer son histoire,
qui prend parfois des tournants inattendus… C’est une aventure chaque fois
différente, et je m’en réjouis d’ailleurs !

Y a-t-il une partie de l’écriture que tu trouves difficile ou que tu
n’apprécies pas ?

Pas vraiment. Même quand je
réécris, ce qui m’arrive souvent d’ailleurs,
c’est chaque fois une découverte, un plaisir… même quand on a une date limite à
respecter pour rendre son manuscrit !


As-tu d’autres projets en cours ?


Je viens justement d’en rendre
un à mon éditrice et pour le reste… Je
me repose un peu.

L E

P R I N T E M P S

D E S

J E U N E S

R E P O R T E R S


As-tu une ambiance de prédi- plumes incroyables… J’ajouterai
lection pour écrire ?
bien entendu des auteurs comme Nadia Coste ou encore Lise Syven, qui

Là non plus, pas vraiment  ! m’embarquent toujours dans leurs
En fait, j’écris mieux dans le silence aventures avec grand talent !
– pas complet quand même, mais disons dans le calme. Je n’ai pas besoin
As-tu un travail à côté ? Ou te
d’ambiance musicale, elles ont plutôt consacres-tu entièrement l’écriture ?
tendance à me déconcentrer. Pour
le reste… Je n’ai pas de rituel pour
Oui, j’ai un travail à côté, je
commencer à écrire, je profite plutôt suis traductrice à plein temps. La seule
de chaque moment pour poursuivre écriture, pour les auteurs francophones,
mon histoire (une habitude prise lors est encore trop peu rémunératrice
des NaNoWriMos !)
pour constituer un revenu confortable
– même si des auteurs en vivent – et

Quel est ton livre de chevet ?
dans mon cas, ce n’est pas une option
pour le moment.

Je viens justement d’en terminer un, All The Rage par Courtney Sum-
Écris-tu tous les jours ou t’armers, un formidable roman que j’espère rive-t-il de ne pas écrire pendant une
voir traduit en français bientôt.
longue période ?

ce qui ne m’empêche pas d’aimer me
balader et voyager entretemps !

As-tu des conseils pour les jeunes auteurs ?


Des recommandations, tout
au moins ! D’abord, de lire. Nourrissez votre imagination, soyez curieux
et explorez les divers horizons. Ensuite,
de se lancer. Vous voulez écrire  ?
Lancez-vous  ! Vous connaissez sûrement le bon vieil adage, « c’est en
forgeant qu’on devient forgeron  »,
eh bien, c’est la même chose pour
l’écriture ! Et enfin, ne restez pas tout
seul. Le cliché de l’écrivain misanthrope, dans sa tour d’ivoire, a vécu.
Entourez-vous de personnes qui partagent la même passion que vous, qui
pourront vous relire et vous donner
un avis objectif et détaillé. C’est une

Quel est ton genre préféré ?

Je suis assez irrégulière, per- aide inestimable quand on se lance –
sonnellement, j’ai de grandes périodes et d’ailleurs, plus tard aussi ! – et cela

Je suis plutôt éclectique dans d’activité et à côté de celles-ci, je peux crée de belles amitiés ! •
mes lectures, même si j’aime forcé- rester sans écrire pendant plusieurs
ment beaucoup l’imaginaire et le young jours/semaines. C’est un rythme qui
adult !
me convient bien, je ressource mon
imagination – et Muse au passage !

Quel est ton auteur préféré ?

As-tu d’autres activités qui

Oh là là … plein  ! Depuis sont, pour toi, aussi importantes que
des auteurs classiques, comme Emile l’écriture ?
Zola, jusqu’à des auteurs toujours
vivants – encore heureux d’ailleurs,
D’autres loisirs, tu veux
puisqu’il n’a pas encore terminé son dire  ? Non, clairement pas. Combicycle – je veux bien sûr parler de ner l’écriture avec un travail à plein
George R.R. Martin, en passant par temps, mes proches et mes amis me
Fred Vargas et Léonora Miano, des prend assez de temps et d’énergie,

Où suivre Cindy Van Wilder ?
Sur son site officiel : cindyvanwilder.wordpress.com
Sur Facebook : Cindy Van Wilder - auteur
Sur Twitter : Cindy_vw
En savoir plus sur l’illustrateur : kay-joon.fr
24

GÉNÉRATION ÉCRITURE
L’association des jeunes auteurs

À PARAÎTRE EN 2016
hors-série #4 : l’abécédaire

Après avoir passé un an à lire 26 fictions
correspondant aux 26 lettres de l’alphabet, les
jeunes internautes partagent avec vous leurs
plus belles découvertes du net dans un nouveau
webzine hors-série, à paraître au cours du premier trimestre 2016.

Pour en savoir plus ou pour rejoindre le défi,
rendez-vous sur le blog du projet :
abecedaire-2015.skyrock.com

LE WEBZINE DE GÉNÉRATION ÉCRITURE

Retrouvez à chaque trimestre
un nouveau numéro du webzine, incluant un dossier thématique sur des
sujets aussi variés que les genres littéraires, le monde de l’édition, les salons
littéraires et bien d’autres.


Depuis 2010, nos webzines
sont consultables en ligne ou téléchargeables gratuitement ici.

Le webzine est un projet participatif auquel tout le monde peut
prendre part. Plus d’informations ici.

LE CODEX

grimoire pour auteurs en herbe
378 pages d’aide à l’écriture, disponibles
gratuitement en ligne et au téléchargement.

LES PROJETS DE L’ASSOCIATION
RETROUVEZ L’INTÉGRALITÉ DE NOS PROJETS SUR NOTRE SITE INTERNET
TWITTER | FACEBOOK | BLOG | FORUM

CRÉDITS
LE PRINTEMPS DES JEUNES REPORTERS
Un projet Génération Écriture dirigé par Ielenna
Édition et correction par LorianO
Maquette et mise en page par Tiphs

La voie de la colère, d’Antoine Rouaud

chronique et interview par Matt
Gagner la guerre, de jean-philippe jaworski

chronique et interview par Lorelei
Les fiancés de l’hiver, par Christelle dabos

chronique et interview par Laure
Lune mauve, de Marilou aznar

chronique et interview par Lizzie K.
LES OUTREPASSEURS, dE CINDY VAN WILDER

chronique et interview par Joshiroo

CRÉDITS IMAGES
image de couverture : shutterstock
Illustrateur de la voie de la colère : Larry Rostant
Illustrateur de gagner la guerre : Arnaud Cremet
Illustrateur des fiancés de l’hiver : Laurent Gapaillard
Illustrateur de lune mauve : Jean Bourget
Illustrateur des outrepasseurs : Kay Joon


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